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Gij, die ons Duitschlands broederzangen
door Victor Dela Montagne

HANSSENS (Ch.) chef d'orchestre et compositeur belge, mort à Bruxelles en 1871

Gij, die ons Duitschlands broederzangen
beminnen en waardeeren deed,
en, meester in het rijk der klanken,
den strijd der kunsten streedt:
Slaap rustig in den schoot der aarde,
gewiegd door uw verheven lied;
de lauwren die 't genie u gaarde,
vernielt de toekomst niet.

V. A. Dela Montagne


La mort de Charles Hanssens
door "M.O.I."

Quand il y a quinze jours, je déplorai la mort de Fétis, et que je disais en parlant de Charles Hanssens: "Aussi un de nos musiciens remarquables, qu'on tâche d'ensevelir par l'ingratitude dans un cercueil prématuré," je ne m'attendais pas à m'écrier aussi tôt:
Charles Hanssens n'est plus !
Les vieux maîtres s'en vont !
A vous autres, les jeunes, de vous recueillir et de sentir peser lourdement la responsabilité de l'héritage glorieux que lèguent à ceux qui restent ceux qui nous quittent.
Charles Hanssens, homme d'énergie et d'initiative, provoqua un remarquable développement artistique, particulièrement à Gand. Qui nous dira que Gand sut conserver ce que Hanssens lui avait légué, après que, découragé par l'indifférence et l'ingratitude, il se réfugia dans la capitale.
Après sa ville natale, Bruxelles fut le lieu ou Hanssens fit surtout éclater tout l'intérêt qu'il portait à l'art et aux artistes. Il fonda l'Association des artistes musiciens. A cette époque, un certain enthousiasme régnait parmi les artistes en général, et l'idée généreuse du grand maître que nous venons de perdre trouva de l'écho. Cette oeuvre superbe fut instituée et existe florissante aujourd'hui encore.

La propagation des oeuvres classiques fut la préoccupation constante de Hanssens. En outre, il forma cet admirable orchestre du Théâtre de la Monnaie, qui, il n'y a pas longtemps, vivait encore de son ancienne gloire et des traditions léguées par lui. Et puis, ses élèves sauront nous dire quel admirable maître il fut dans l'enseignement de l'harmonie et de l'instrumentation. Quelle clairvoyance et quelle capacité dans la lecture des partitions ! Rien ne lui échappait.

Les jeunes artistes trouvaient en lui un conducteur sûr, qui ne leur épargnait ni les conseils, ni les semonces. Beaucoup ne pouvaient se faire au côté âpre de cette nature virile ; mais cette âpreté même était le signe de sa force et nullement celui d'un mauvais naturel. Hanssens avait une bonté de coeur inépuisable ; mais combien peu ont eu regard assez profond pour traverser l'écorce un peu rude qui enveloppait cette fière et indomptable nature ; ce ne fut point sans luttes, ni sans subir d'indignes persécutions, qu'il continua sa carrière. Aussi la termina-t-il prématurément, accablé par l'injustice.

Ne le voyons-nous pas, sous prétexte d'incapacité, forcé de quitter sa position de chef d'orchestre du théâtre de la Monnaie, au moment où, respecté par tous comme il aurait dû l'être, il devait jouir de son oeuvre, et se trouver vieillard à la tête de ceux qu'il avait élevés.

N'est-ce pas un beau spectacle de voir, conduisant ces formidables orchestres allemands, des hommes éminents, qui à peine soutiennent leur bâton de commandement, mais qui rencontrent dans leurs soldats un dévouement et un enthousiasme tellement grand, que les gestes mêmes semblent devenus inutiles. La pensée rayonne autour des têtes blanchies et se répand sur toute cette armée d'exécutants. On sent là, la reconnaissance profonde, l'appréciation absolue et la soumission digne de ceux qui ont travaillé.

Etait-ce bien de l'avis de tout le monde que le père Fétis, faisant énergiquement respecter sa tête blanche, ne précéda pas Hanssens dans une abdication forcée. Les voilà bien, ces piocheurs de l'art : ils se dévouent corps et âme, pour se voir finalement rejetés, comme le dernier des maçons qui ne pourrait plus tenir la truelle. Les plus énergiques succombent. Hanssens, lui, a été tué !

Comme compositeur, Hanssens se disait dans le droit chemin en regardant les maîtres allemands, comme les tuteurs naturels de notre développement musical. Il n'aimait guère la musique italienne et française, ce qui lui suscita bien des ennemis. Hanssens a fait une guerre à mort à toute influence française et italienne. Non pas qu'il méconnût ce qu'il pouvait y avoir de mérite dans ces écoles, mais instinctivement il sentait que cette influence si forte ne faisait que provoquer une indifférence impardonnable pour l'art allemand.

Il y aurait encore beaucoup à dire sur les oeuvres de Hanssens, mais l'avenir se chargera de rendre justice à un homme, pour lequel je puis dire, comme je l'ai dit de Fétis : "Est-il bien certain que cet homme fut apprécié de son vivant comme il devait l'être ?" Triste point d'interrogation qui s'est dressé de tout temps devant ce que nous appelons "les contemporains."

M.O.I.

Grégoir, E.: Hanssens (Ch.), in: Documents Historiques relatifs à l'art et aux artistes-musiciens - Poésies, Epitaphes, etc., composées en l'honneur d'artistes-musiciens, dl. 3, Brussel, 1875, p. 46. & "M.O.I.": La mort de Charles Hanssens, in: Le guide musical, jrg. 17, nr. 16, 20 april 1871, p. [2].